Mon arrière Grand-père du coté de ma mère.
A rénové, suite héritage, ma maison de St Martin Lys en 1924.
Alfred était originaire de Bessède de Sault où il était ouvrier agricole.
Il avait épousé Marguerite Mounier qui, elle, venait de St Martin.
Lors de la guerre de 14-18, il a été fait prisonnier et déporté en Allemagne pour travailler dans les exploitations agricoles en remplacement des soldats mobilisés au front (camp de prisonniers de guerre de Grafenwöhr en Bavière du 21 septembre 1914 au 18 février 1919). Malgré ses nombreuses tentatives d'évasion, il n'a pu retourner au pays qu'une fois la guerre terminée, en ayant appris à parler l'allemand et avec une furieuse envie d'indépendance.
Aussi dès qu'il lui fut possible, il racheta les parts des autres cohéritiers pour s'installer à son compte dans cette ancienne auberge en ruine de St Martin Lys.
Il monta son élevage de mouton à son compte et s'installa avec sa petite famille : son épouse et sa fille Noëlle déjà âgée de 10 ans.
Il disposait alors de quelques lopins de terre éparpillés dans la montagne pour assurer une maigre subsistance de produits agricoles et il faisait paître (comme pâtre communal) ses bêtes sur le pâturage commun du plateau de Planèses où il avait récupéré un emplacement dans la grotte - pont naturel.
A sa maison de St Martin même, une bergerie avait été accolée à l'ancien bâtiment pour accueillir les moutons l'hiver.
L'activité de tonte, plus la vente des produits dérivés (et l'argent reçu de l'usine par ma grand-mère ?) rapportèrent suffisamment pour que mon ancêtre devienne l'heureux propriétaire de la première voiture de St Martin : la citron (une Citroën jaune).
C'est lui qui fit découvrir à ma mère la grotte de Planèses.
Décédé avant ma naissance, je n'ai de souvenir que ce que ma grand-mère et ma mère m'en ont rapporté : la claque que sa fille avait reçue, de lui avoir dit dans le flot de la conversation "t'es bête", sa fierté d'avoir un fils (François), sa connaissance des sources du coté de Planèses (connaissance non transmise à ma mère, ce qu'elle regrettait beaucoup)...
C'était jour de lentille, comme chaque semaine. Un grand jour de souffrance pour Marguerite... Ces lentilles, c'était elle qui les avait semées, butées, entretenues et ramassées. Car sur ces terres, pas le choix : sans eau, impossible de planter autre chose. Et puis Alfred, quelles remarques lui aurait-il faites, si elle ne lui en avait pas cuisinées, des lentilles ?
Mais voilà les lentilles après les avoir ramassées, il fallait les trier, et là... Elle passait des heures à ausculter chaque graine, elle demandait même à sa fille de revérifier après elle, en examinant à son tour chaque graine l'une après l'autre. Une fois triées elle les mettait au pot devant la cheminé avec quelques petits morceaux de charcuterie pour s'assurer qu'elles auraient ce fumé si particulier et elle les laissait toute la journée à mijoter en s'assurant simplement que le feu ne s'arrête jamais.
Mais pourtant comme à chaque fois, Alfred servi : "Et aller ! c'est toujours pareil ici ! Vous voulez me casser une dent ou quoi ?" Il avait réussi à tomber sur le seul petit caillou oublié dans tout le plat. Ah! que Noëlle et Marguerite auraient préféré que ce soient elles qui tombent sur ce caillou...
Alfred Bézia 1883 1956
Remarque : La mère d'Alfred a été, jusqu'à leur décès, la servante de l'abbé Boudet. Sa tombe est, juste à un emplacement près, à cotè de celle de l'abbé dans le cimetière d'Axat.